mercredi 30 novembre 2016

l'Amérique face à son destin

Au lendemain de l’élection présidentielle américaine – quelque soit le candidat élu –, les dirigeants étasuniens devront faire un choix décisif pour l’avenir de la puissance mondiale déclinante et celui du monde.

Les Etats-Unis vont-ils, en cas d’élection d’Hillary Clinton, poursuivre leur destructrice (et autodestructrice) course folle pour le monde, poussée par l’hybris, jusqu’à nous mener à une guerre mondiale ? Ou bien, si Donald Trump est élu, vont-ils se recentrer sur eux-mêmes dans une logique isolationniste afin de se régénérer (à commencer par leur économie) et renoncer à l’idéologie messianiste de la Destinée manifeste – qui a muée après la Seconde Guerre mondiale pour devenir un projet impérialiste globale  ?

La fin d’un empire

En 2002, l’historien Emmanuel Todd publiait un livre sur la décomposition du système américain[i] qui eut un fort retentissement. Il y développait une thèse à contre-courant à l’époque : bien loin d’être une hyperpuissance invincible comme semblerait l’exprimer leur politique extérieure, les Etats-Unis sont en déclin ; l’examen des forces démographiques et culturelles, industrielles et monétaires, idéologiques et militaires qui transforment la planète ne confirme pas la vision d’une Amérique invulnérable. Le monde est trop vaste, disait Emmanuel Todd, trop divers, trop dynamique pour accepter la prédominance d’une seule puissance.

Il écrivait dans l’ouverture de son ouvrage à propos des représentations de la puissance américaine :

« Elles présupposent une Amérique exagérée, dans la dimension du mal parfois, dans celle de la puissance de toujours. Elles nous interdisent de percer le mystère de la politique étrangère américaine parce que la solution doit être recherchée du côté de la faiblesse et non de la puissance. Une trajectoire stratégique erratique et agressive, bref la démarche d’ivrogne de la « superpuissance solitaire », ne peut être expliquée de façon satisfaisante que par la mise à nu de contradictions non résolues ou insolubles, et des sentiments d’insuffisance et de peur qui en découle.

La lecture des analyses produites par l’establishment américain est plus éclairante. Au-delà de toutes leurs divergences, nous trouvons, chez Paul Kennedy, Samuel Huntington, Zbigniew Brzezinski, Henry Kissinger ou Robert Gilpin, la même vision mesurée d’une Amérique qui, loin d’être invincible, doit gérer l’inexorable réduction de sa puissance relative dans un monde de plus en plus peuplé et développé. »[ii]

Si l’on se penche sur les écrits du plus éminent de ces stratèges de l’impérialisme américain, Zbigniew Brzezinski, il apparaît clairement – dans son livre Le grand échiquier (1997) – qu’il était effectivement conscient de cet état de fait ; mais il avait conçu une nouvelle stratégie pour maintenir la prééminence mondiale des Etats-Unis malgré la relative faiblesse de son système impériale.

Brzezinski proposait, pour contrôler l’Eurasie et par suite le monde, à la fois de maintenir un certain nombre de pays dans un état de vassalité et d’empêcher l’émergence en Eurasie d’un rival potentiel de l’Amérique. Ainsi il explique que :

« Pour les Etats-Unis, la définition d’une orientation géostratégique pour l’Eurasie exige d’abord de la clarté dans la méthode : il est nécessaire de mettre sur pied des politiques résolues à l’égard des Etats dotés d’une position géostratégique dynamique et de traiter avec précaution les Etats catalyseurs. Sur le fond, cette approche n’a de sens qu’autant qu’elle sert les intérêts de l’Amérique, c’est-à-dire, à court terme, le maintien de son statut de superpuissance planétaire et, à long terme, l’évolution vers une coopération mondiale institutionnalisée. Dans la terminologie abrupte des empires du passé, les trois grands impératifs géostratégiques se résumeraient ainsi : éviter les collusions entre vassaux et les maintenir dans l’état de dépendance que justifie leur sécurité ; cultiver la docilité des sujets protégés ; empêcher les barbares de former des alliances offensives. »[iii]

On l’a vu ces dernières années, cette stratégie consistant à prévenir l’émergence d’une puissance eurasiatique – en l’occurrence la Russie – et à neutraliser les vassaux en empêchant leur alliance, a échoué (si l’on exclu l’Europe et les pays en périphérie de la Russie et de la Chine).

En effet, l’on a assisté, parallèlement à la réémergence de la Russie, à l’agrégation successive autour de celle-ci et de ses alliés, d’un certain nombre de pays (à des degrés divers) : les BRICS réunissant la Russie, le Brésil, l’Inde, la Chine, l’Afrique du Sud et l’Indonésie, constituent, dans le cadre d’une coopération économique, une alternative à l’ordre économico-financier des Etats-Unis via notamment ses relais que sont les institutions internationales (FMI, Banque Mondiale, OMC, Union européenne…) ; et sur le plan purement géostratégique, dans la seule année 2016, le Maroc (allié et vassal des Etats-Unis) s’est tourné vers la Russie (et la Chine), le gros pion otanesque turc a été habilement retourné et ramené (peut-être temporairement compte tenu de l’instabilité d’Erdogan) dans le giron russe et le président des Philippines, Rodrigo Duterte, a officialisé sa rupture avec les Etats-Unis tout en annonçant son rapprochement d’avec la Chine (et la Russie), auxquels s’ajoutent les alliés traditionnels de la Russie.

Par ailleurs, la stratégie proposée par Brzezinski en 1997 consistant à séparer la Russie de l’Ukraine a non seulement été un échec, mais la tentative s’est conclue par la récupération, par les Russes, de la Crimée.

Nous avons là les conséquences de ce qu’Emmanuel Todd pointait du doigt en 2002, à savoir l’inquiétude touchant les alliés et clients traditionnels des Etats-Unis, suscité par la politique follement agressive de Washington, laquelle est diamétralement opposée à celle des vieux empires.

Avec le recul, si l’on compare la planification géostratégique de Brzezinski faite en 1997 et l’étude prospectiviste d’Emmanuel Todd en 2002, il est évident que l’histoire récente a donné raison au second. Il y a 14 ans Todd écrivait :

« Face à la question russe, la stratégie américaine avait deux objectifs dont le premier n’est déjà plus accessible et dont le second apparaît de plus en plus difficile à atteindre.

Premier objectif : une désintégration de la Russie, qui pouvait être accélérée par la stimulation des indépendantismes au Caucase et par une présence militaire américaine en Asie centrale. Ces démonstrations de force devaient encourager les tendances provinciales centrifuges à l’intérieur même de la partie ethniquement russe de la Fédération de Russie. C’était sous-estimer gravement la cohésion nationale russe.

Deuxième objectif : le maintien d’un certain niveau de tension entre Etats-Unis et Russie devait empêcher le rapprochement entre Europe et Russie – la réunification de la partie ouest de l’Eurasie – en préservant le plus longtemps  l’antagonisme hérité de la guerre froide. Mais le désordre et l’incertitude engendrés par la politique américaine au Moyen-Orient ont à l’inverse fini par créer les conditions optimales d’une réinsertion de la Russie dans le jeu international, situation dont Vladimir Poutine a immédiatement profité.

Celui-ci a offert à l’Occident, dans un impressionnant discours prononcé pour l’essentiel en allemand au Bundestag, le 25 septembre 2001, la vraie fin de la guerre froide. Mais quel Occident ?

Aider à court terme les Etats-Unis dans leurs opérations micromilitaires et médiatiques en Afghanistan, pays du fantasme stratégique, n’est pour les Russes que l’apparence des choses. L’essentiel, c’est de se rapprocher de l’Europe, première puissance industrielle de la planète. La mesure des flux d’importations et d’exportations permet de définir les enjeux réels du subtil jeu à trois qui se dessine entre la Russie, les Etats-Unis et l’Europe.

En 2001, la Russie et les Etats-Unis ont échangé pour 10 milliards d’euros de biens, la Russie et l’Union européenne pour 75 milliards, soit 7,5 fois plus. La Russie propose implicitement à l’Europe un contrepoids à l’influence américaine sur le plan militaire et la sécurité de ses approvisionnements énergétiques. Le marché est tentant.

Quelle que soit l’intelligence du livre de Brzezinski, il y avait dans la métaphore de l’échiquier de son titre un je-ne-sais-quoi d’acte manqué, au sens freudien, comme un pressentiment de ratage : on ne devrait pas jouer aux échecs avec les Russes dont c’est le sport national. Ils sont intellectuellement bien entrainés à ne pas faire l’erreur que l’adversaire attend d’eux, en l’occurrence réagir sottement à des provocations sans substance stratégique réelle, en Géorgie ou en Ouzbékistan. Refuser un échange, refuser une prise, refuser un affrontement local mineur proposé par l’adversaire, c’est le b.a.-ba des échecs. Surtout lorsque l’on est en état de faiblesse. Peut-être évoquera-t-on un jour dans les manuels de diplomatie une « défense Poutine » dont la formulation théorique serait quelque chose du style : comment obtenir, dans le contexte d’une chute de puissance, un basculement des alliances ? »[iv]

Nous sommes aujourd’hui arrivés à la fin d’une séquence d’affrontement, d’une partie d’échec que les Russes sont en train de remporter irrémédiablement face aux Etats-Unis.

Dans ce contexte, il reste aux dirigeants étasuniens deux solutions : renverser l’échiquier par une guerre mondiale ou renoncer (du moins partiellement et intelligemment) à l’empire.

Le moment décisif : la fin de la politique impériale ou la conflagration mondiale

ce qui explique l’extrême fébrilité et les déclarations ultra-agressives de certains dirigeants américains. L’exemple le plus récent et frappant est celui du chef d’état-major de l’Armée américaine, le Général Mark Milley, qui lors d’un discours public donné lors de la réunion annuelle de l’Association of the United States Army à Washington D.C., le 4 octobre 2016, a menacé directement la Russie, la Chine et leurs alliés :
« La volonté stratégique de notre nation, les Etats-Unis, est remise en cause et nos alliances testées comme elles ne l’ont pas été depuis de très nombreuses décennies. Mais je veux être clair ; je veux être sans ambiguïté. Je veux être clair avec ceux qui tentent de s’opposer aux Etats-Unis… nous allons vous stopper et nous allons vous battre plus durement que vous ne l’avez jamais été auparavant… nous détruirons n’importe quel ennemi, n’importe où, n’importe quand… Je mets en garde les ennemis de l’Amérique…
Nous sommes de plus en plus contestés par des adversaires potentiels très compétents qui agissent clairement en s’opposant à nos intérêts. Mais si la dissuasion échoue, nous, en tant qu’armée, nous, en tant que nation, devons être prêts à nous battre ! D’autres pays, Russie, Iran, Chine et Corée du Nord ont appris de nous… Ils ont étudié notre doctrine, nos tactiques, nos équipements, notre organisation, notre entraînement et nos dirigeants. Et en retour ils ont révisé leurs propres doctrines et ils modernisent rapidement leurs armées aujourd’hui pour déjouer nos forces, dans l’espoir d’arriver à nous vaincre un jour…
A ce stade nous pouvons développer quelques points que nous avons appris au cours de l’étude que nous avons menée intensément cette année sur la guerre future de haute intensité entre des Etats-nations de grande puissance. Et le premier est sans surprise qu’elle sera hautement mortelle, très hautement mortelle, contrairement à tout ce que notre armée a connu au moins depuis la Seconde Guerre mondiale… »[v]
Ce discours belliciste quasi-hystérique – qui masque mal la faiblesse et l’anxiété des impérialistes américains – est la traduction verbale de la politique qu’à l’intention de mener Hillary Clinton.
Zbigniew Brzezinski, bien plus mesuré, a cette année même été contraint, face à la réalité, de renoncer purement et simplement à ses espoirs de domination impériale sans partage.
Il a publié le 17 avril 2016 dans la revue The American Interest un texte au titre explicite « Toward a Global Realignment »[vi] (Vers un réalignement global). Lorsque l’on se penche sur cette nouvelle stratégie proposée par Brzezinski, il apparaît qu’elle a pour objectif d’éviter une conflagration mondiale, maintenir l’influence américaine dans le monde ainsi que ses positions stratégiques.
Avec réalisme et froideur il débute son analyse par le constat suivant :
« Les Etats-Unis sont toujours l’entité politique, économique et militaire la plus puissante au monde mais, étant donné les complexes changements géopolitiques régionaux, elle n’est plus la puissance impériale globale. ».
Partant de ce constat, il propose une nouvelle stratégie en plusieurs points et commence par proposer que l’Amérique forge une coalition impliquant, à divers degrés, la Russie et la Chine, pour traiter la crise proche-orientale, en échange de concessions russes – plus diplomatiques que stratégiques à proprement parler – en Ukraine, en Géorgie et dans les Etats baltes.
Il envisage par ailleurs un rapprochement plus franc avec la Chine et ainsi la découpler de la Russie – à laquelle il propose implicitement de lui laisser la porte de l’Europe ouverte, afin de détourner son regard de l’Est – en misant sur l’apparition de futures tensions sino-russes ; ainsi il écrit :
« Le futur de la Russie dépend de son habilité à devenir la Nation-Etat majeure et d’influence qui est une partie de l’Europe unificatrice. En ne le faisant pas, cela pourrait avoir des conséquences négatives et dramatiques dans la capacité de la Russie à résister à la pression territoriale et démographique de la Chine, qui est de plus en plus encline, à mesure que sa puissance augmente, à reconsidérer les traités « inégaux » que Moscou à imposé à Pékin dans le passé. La meilleure perspective pour la Chine dans un futur proche est de devenir le principale partenaire de l’Amérique en contenant le chaos global qui émane (y compris pour le nord-est) du Moyen-Orient… Le rapprochement entre la Chine et les nouvelles républiques d’Asie centrale, les Etats musulmans post-britannique dans le sud-ouest asiatique (notamment le Pakistan) et spécialement l’Iran (donnant des atouts stratégiques et économiques significatifs), sont les objectifs naturelles à atteindre dans la perspective géopolitique régionale de la Chine. Mais ils peuvent être aussi les objectifs d’une accommodation globale sino-américaine. »
Cette stratégie pourrait ressembler à celle que pourrait appliquer Donald Trump si il était élu – et ainsi préserver sa propre personne et son mandat présidentiel d’éventuelles représailles d’une partie de l’oligarchie américaine qui est derrière Brzezinski. En s’alignant sur la nouvelle stratégie de Brzezinski, Trump pourrait alors mener une nouvelle politique internationale, sans affrontement avec la Russie, en ménageant l’oligarchie américaine et en tenant une bonne partie de ses promesses de campagne faite au peuple américain, mais en abandonnant l’idée d’un isolationnisme pur et simple.
Car Brzezinski, qui demeure un impérialiste ontologique, s’oppose aux isolationnistes américains dont fait partie Trump. Les arguments de Brzezinski, si l’on se place du point de vue de l’establishment américain, ne manquent pas de pertinence (même s’il force évidemment les traits négatifs des conséquences d’une politique isolationniste) :
« Un retrait compréhensif des U.S. du monde musulman, favorisé par les isolationnistes américains, pourrait donner naissance à de nouvelles guerres (par exemple, Israël vs Iran, Arabie Saoudite vs Iran, une intervention majeure de l’Egypte en Libye) et pourrait générer une crise de confiance plus profonde quant au rôle de l’Amérique en tant que stabilisateur global. D’une manière différente mais radicalement imprévisible, la Russie et la Chine pourraient être les bénéficiaires géopolitiques de ce type de développement et l’ordre mondial lui-même en serait la victime géopolitique immédiate. Last but not least, dans de telles circonstances une Europe inquiète et divisée verraient ses Etats membres actuels rechercher des patrons et rivaliser les uns les autres dans des arrangements alternatifs mais séparés parmi le plus puissant trio (il fait allusion à la Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne) »
En somme, Brzezinski a fini par accepter le monde multipolaire et propose en conséquence de partager le monde avec la Russie et la Chine ; une sorte de Conférence de Yalta II mais sans guerre mondiale, pour sauver les murs et la face des Etats-Unis.

Source: Arrêt sur Info

samedi 26 novembre 2016

Le père de la Révolution cubaine et de la résistance à l’Empire étasunien est mort

La mythification, comme la guerre idéologique, déforme toujours l’itinéraire complexe du leader cubain. Pour beaucoup, ce «  communiste souterrain  » aurait caché son jeu pour «  trahir la révolution  ». L’hypothèse ne résiste pas à l’analyse historique. L’étude de la jeunesse du «  Comandante  », né il y a 90 ans en août 1926, s’avère incontournable pour déceler à la fois la cohérence et les contradictions de ses engagements, pour comprendre comment Castro est devenu Fidel...

 


Le 8 janvier 1959, Castro et ses guerilleros entrent à La Havane

 

Il avait tout pour être un « héritier »  ; il est un transfuge de sa classe. Fidel Alejandro Castro Ruz naît hors mariage, le 13 août 1926. Ce troisième fils d’un père espagnol, Angel, venu combattre les partisans de l’indépendance de l’île, et de sa servante cubaine, Lina Ruz, épouse illégitime, a tout pour devenir lui-même un oligarque, un grand propriétaire terrien comme papa, à Birán, actuelle province de Holguín. Dix mille hectares. Ils seront en partie confisqués par la révolution, puis « cédés » par la famille Castro.

Le garnement joue dans les dépendances de la « finca » avec les fils des paysans pauvres qui triment sans répit pour son père (300 familles). Le solide gaillard se rend vite compte que ses copains vivent misérablement, sont maltraités  ; les relations avec le patriarche, sa brute de père, se tendent. Castro confiera à Ignacio Ramonet qu’il devint révolutionnaire à partir précisément de cet environnement d’enfance. Doué, le jeune Castro étudie, comme tous les fils de bonne famille, chez les Jésuites, d’abord à Santiago, ensuite au collège Belén à La Havane. Ses maîtres l’éveillent, dirait-on aujourd’hui, à la citoyenneté.

À l’automne 1945, il s’inscrit à la fac de droit de La Havane. Rebelle sans cause précise, il fait le coup de poing et de feu contre les bandes d’ultras. Il se politise à grande vitesse, acquiert une conscience révolutionnaire et prend souvent la parole dans le patio ou sur les escaliers de l’université. Le 6 novembre 1947, il y proclame une sorte de programme patriotique  ; la frustration d’une pseudo-indépendance nationale, de surcroît tardive (1899), le hante. Le jeune étudiant marche en tête des manifestations contre le gouvernement corrompu et « vendu » de Grau San Martin. Dans ce chaudron idéologique, il lit Marx et se familiarise avec ses idées. Faire la révolution. Orateur hors pair, il milite à la puissante Fédération des étudiants universitaires (FEU), et se fait rapidement connaître, à tel point que « trois ans plus tard, il sera déjà un homme politique en vue à Cuba. À La Havane, Castro était déjà Fidel » [1].

Castro s’engage dans la vie publique en 1947  ; il rejoint le très anticommuniste, petit-bourgeois et populiste Parti du peuple cubain (PPC), plus connu sous le nom de Parti orthodoxe. Son leader, Eduardo Chibas, au programme social progressiste, dénonce la corruption et jouit d’une grande popularité. Chaque semaine, il s’adresse aux Cubains dans une émission à Radio CMQ. Fidel reste « orthodoxe » pendant huit ans, y compris après le suicide en direct à la radio, en 1951, du charismatique Chibas, destiné à « réveiller » le peuple. En 1948, présent à Bogota pour un congrès étudiant, Castro participe au Bogotazo, le soulèvement populaire provoqué par l’assassinat de Jorge Eliécer Gaitán, candidat « libéral » favori aux élections à venir. De retour à Cuba, candidat du PPC à la députation, le jeune juriste semble promis à une carrière politique chez les « orthodoxes ».

Le coup d’État militaire de Fulgencio Batista, pour le compte de Washington, le 10 mars 1952, à trois mois d’élections que le PPC allait sûrement gagner, modifie toute la donne. Bogota, La Havane, l’intervention des États-Unis renforcent Castro dans son anti-impérialisme. Dès l’installation de la sanglante dictature (20 000 morts entre mars 1952 et décembre 1958), Castro part en guerre contre elle. La voie électorale se ferme. Peu à peu, il s’oriente vers une stratégie insurrectionnelle, de guerre de guérilla, dans le droit fil de l’histoire cubaine, de l’héritage des deux guerres d’indépendance.

Castro a conscience de prolonger la pensée et l’action du « héros national » José Marti, son inspirateur et modèle mort au combat le 19 mai 1895. À cette époque, Castro est d’abord « martinien », porteur d’un « nationalisme » radical hérité du patrimoine historique cubain, teinté de « socialisme utopique ». Pour José Marti, les États-Unis constituaient déjà, au XIXe siècle, « le pire danger qui menace notre Amérique ». La formation – incomplète – de la nation cubaine, dans ce contexte, acquiert une dimension anti-impérialiste. Le « fidélisme » apparaît alors comme « une synthèse pragmatique, un mélange d’un peu de Marx, de Engels, de Lénine, assez de Che et beaucoup de José Marti  » (2). Sur cet « avant 1959 », Castro dira qu’il « avait peut-être deux millions de préjugés petits-bourgeois  » (3).

Le 26 juillet 1953, sous les ordres de Castro, 131 jeunes partent à l’assaut de la symbolique forteresse militaire, la caserne de Moncada à Santiago. L’opération, destinée à provoquer un soulèvement populaire, échoue et la petite troupe est décimée  : 6 morts au combat, 49 survivants torturés, puis massacrés. L’acharnement des tortionnaires et le courage inouï de ces jeunes confèrent à l’action un impact national, émotionnel et politique considérable. Le Parti socialiste populaire (PSP, communiste) qualifie, lui, l’assaut de «  tentative de putsch aventuriste  ». Le PSP traîne une réputation entachée de collaboration depuis le gouvernement de Front populaire avec Batista, dans lequel il eut deux ministres de 1942 à 1944.


Source: Humanite.fr

jeudi 24 novembre 2016

La Turquie envoie des avions pour aider Israël à étreindre une vague d’incendies

Le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu a remercié, jeudi, la Turquie pour avoir envoyé des avions spécialisés en vue d'aider Israël à éteindre une vague de feux de forêt ayant éclaté dans plusieurs parties du pays.

La Grèce, la Croatie, l’Italie, l’administration chypriote-grecque et la Russie ont également envoyé un total combiné de 10 avions pour aider à éteindre ces incendies.

Le bureau du Premier ministre israélien a indiqué avoir demandé un soutien étranger en raison des craintes que des vents forts ne fassent propager les feux durant la journée de jeudi.

Le site internet du journal "The Times d’Israël" a rapporté que des centaines de personnes ont été évacuées, jeudi, de la ville septentrionale de Haifa, tandis que les incendies continuent de faire rage depuis deux jours.

Source (Média Turc)

Nouvelle réunion en France sur la Syrie: quels objectif poursuit Paris ?

On n'aurait pas cru la France à ce point déterminée à "singer" les Etats-Unis d'Obama! Alors que dans un récent entretien accordé au journal New York Times, le président élu américain dit "attaquer la Syrie revient à attaquer la Russie et l'Iran" et plaide pour qu'"un terme soit mis à la guerre en Syrie le plus rapidement possible", la France de Hollande affûte ses armes. 

Paris vient d'accuser le gouvernement syrien et ses alliés (iraniens et russes, ndlr) d’"avoir abusé de l’incertitude politique aux Etats-Unis" pour mener "une guerre totale  contre les régions sous contrôle des opposants".

Des "opposants" dont la France parle se revendiquent des groupes takfiristes soit ces mêmes groupes qui se trouvent à l'origine des attaques sanglantes à Paris et à Nice et ailleurs, ces deux dernières années. 

Cité par Sky News, la France n'hésite même pas à souhaiter "prendre l’initiative" et reprendre, au nom de sa " vigilance" aux États-Unis, "le leadership de la guerre contre l'Etat et l'armée syriens. 

La diplomatie de Hollande dirigée par Jean-Marc Ayrault, a annoncé même la tenue prochaine à Paris d'un sommet "entre amis" (les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'Allemagne, l'Italie, la Turquie ainsi que des pays arabes, comme l'Arabie saoudite, le Qatar, les Emirats arabes unis et la Jordanie)  pour jouer "le rôle que les États-Unis n’ont pas pu jouer" en raison de ce que Paris appelle l’incertitude politique déclenchée par Trump. 

Alors que l'État syrien s'est dépouillée de ses armes chimiques en 2013, M. Ayrault a déclaré que la France continuait à plaider en faveur de l'adoption par le conseil de sécurité de l'ONU d'une résolution condamnant l'usage des armes chimiques par le gouvernement de Damas.

Les analystes politiques relèvent l'obstination du gouvernement socialiste à vouloir à tout prix poursuivre " sa politique contre-productive" en Syrie, une politique qui a encouragé l'apparition puis l'extension du terrorisme d'abord en Libye et en Syrie puis en Europe et surtout en France. 

Les voix s'élèvent pour autant au sein même des milieux politiques pour dénoncer l'aveuglement socialiste dans le dossier syrien. Le favori de la droite pour la présidentielle 2017 François Fillon a ainsi plaidé pour une coopération étroite avec la Russie, l'Iran et le gouvernement de Bachar el-Assad pour combattre Daech.

Source

Soros débloquera 10 millions de dollars pour soutenir les anti-Trump

George Soros se dit très préoccupé face à une série d’attaques contre les migrants et les minorités nationales qu’il lie au nom de Donald Trump. Dix millions de dollars, voilà le prix qu’il est prêt à payer afin de lutter contre la « rhétorique incendiaire » du président élu. Cependant, Soros n’est-il pas lui-même à l’origine de ces troubles ?

Le multimilliardaire George Soros octroiera 10 millions de dollars de sa fortune personnelle pour la lutte contre les « crimes motivés par la haine ». M. Soros lie le regain récent de ce type de crimes à la « rhétorique incendiaire » utilisée par le président élu des États-Unis Donald Trump, lit-on dans le New York Times. La moitié de cette somme, soit cinq millions de dollars, sera débloquée par sa société à but non lucratif Open Society Foundations cette semaine. Selon les journalistes, le multimilliardaire affirme avoir pris cette décision « dans le contexte d’une série d’attaques contre les migrants et les minorités nationales, qui a commencé dès le 8 novembre », le jour des élections présidentielles aux États-Unis.

Le journal cite les propos de George Soros, qui s’est déclaré « profondément ému » par des centaines de messages diffusés ces derniers jours à propos de crimes haineux commis aux États-Unis, notamment des croix gammées peintes sur des voitures et des murs de bâtiments. Fait curieux, le sujet des « crimes haineux » défraie la chronique des médias libéraux américains depuis la fin de la semaine dernière, soit juste après la rencontre entre le fondateur d’Open Society Foundations avec les représentants de l’aile gauche des démocrates liés à des organisations de minorités raciales. Cette rencontre a eu lieu le 14 novembre.

« Étant donné que le milliardaire participe rarement aux sessions de l’alliance démocratique et se joint rarement à ses activités officielles, ceci peut signifier qu’il tente d’investir dans l’opposition à M. Trump » a écrit à ce moment le journal américain Politico. Dans les rangs de Soros, on commence à parler des premières tranches réparties en subventions s’élevant à 150 000 dollars et destinées à financer des initiatives « anti-Trump ». Rappelons que certains médias, y compris le journaliste Pete Hegseth, avaient auparavant soupçonné George Soros lui-même d’avoir mobilisé des « manifestants professionnels » pour organiser des protestations contre le nouveau président élu.

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Monténégro : le dernier jouet de l’OTAN pour provoquer la Russie

Difficile d’avoir cette semaine un gros titre plus sensationnel que celui-ci : « Le Monténégro dit avoir déjoué le plan soutenu par la Russie de tuer le Premier ministre Djukanovic ». L’information spectaculaire a suivi l’annonce dimanche dernier par le procureur général du pays qu’une tentative de coup d’État effectuée – prétendument – par des nationalistes russes avait été déjouée pendant les élections parlementaires du mois dernier.

 

Sans fournir aucune preuve à l’appui de sa déclaration choc, le procureur général Milivoje Katnic a affirmé qu’une « organisation puissante » comprenant quelque 50 nationalistes russes, serbes et monténégrins avait comploté pour bloquer les élections tenues le 16 octobre et déclencher un coup d’État en assassinant le Premier ministre en poste depuis longtemps, Milo Djukanovic.

Il a été affirmé que le supposé coup d’État avait été déjoué par les autorités monténégrines la veille des élections. Maintenant les mêmes autorités ont conclu que le complot avait été ourdi à l’intérieur du territoire russe.

Sans dévoiler les identités des individus qui auraient été arrêtés, la version officielle manque de crédibilité.

Le porte-parole du Kremlin Dmitry Peskov a rejeté les accusations d’interférence russe au Monténégro. Les partis politiques de l’opposition monténégrine ont quant à eux condamné ces affirmations comme de la « propagande grossière » destinée à pousser l’agenda du Premier ministre pro-OTAN et pro-européen de Djukanovic.

«  Il est évident que le procureur spécial est devenu un serviteur du Parti démocratique des socialistes [au pouvoir] », a déclaré Milutin Dukanovic, chef de l’opposition Front démocratique, cité par Radio Free Europe.

En effet, depuis que Milo Djukanovic a annoncé, il y a près d’un an, ses projets d’adhésion à l’alliance militaire dirigée par les États-Unis qu’est l’OTAN, son gouvernement s’est heurté à une vive opposition au sein de la minuscule population du Monténégro, qui compte environ 620 000 habitants.

Beaucoup de Monténégrins se souviennent que leur pays a été bombardé par l’OTAN il y a 16 ans, lorsqu’il faisait encore partie de la Serbie résultant de l’ancienne Yougoslavie. En 2006, le Monténégro est devenu indépendant de Belgrade, mais les mémoires restent marquées par le bombardement aérien de l’OTAN, dans lequel des milliers de gens ont été tués au cours d’une campagne militaire, qui servait les intérêts occidentaux emmenés par les États-Unis pour démembrer les Balkans et en faire des États pro-occidentaux. Ces États ont depuis lors renforcé l’expansion de l’OTAN vers les frontières de la Russie.

Aujourd’hui, le Monténégro se trouve être le dernier tremplin pour l’agression de l’OTAN contre la Russie.

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mercredi 23 novembre 2016

La liberté sur Internet en France a encore reculé en 2016

l'ONG Freedom House dégrade une nouvelle fois la note de la France en matière de liberté sur Internet. Si la situation n’est pas catastrophique, la trajectoire du pays depuis quelques années suscite des inquiétudes.

 

En 2016, la liberté sur Internet a reculé en France. C’est l’analyse que fait l’association américaine de défense des libertés Freedom House dans son nouveau rapport annuel sur l’état des libertés sur Internet dans le monde. Si l’Hexagone continue d’être un pays où le Net est globalement libre, l’organisation fondée il y a 75 ans ne peut que constater une certaine érosion de la situation depuis 2013.

Sur une grille de notation dans laquelle la note de 200 est la pire que l’on peut avoir, la France obtient 25. C’est un score qui demeure encore très acceptable. Par contre, c’est la trajectoire qui n’est pas très encourageante. En 2013, la France obtenait 20 points ; idem en 2014, avec une notation stable. L’année suivante, les choses se sont gâtées avec un recul de 4 points. Et cette année, c’est un point qui a été perdu.

 Deux pays européens obtiennent la meilleure note, ex-æquo avec 6 points : l’Islande et l’Estonie. Arrive ensuite le Canada, mais loin derrière : le pays à la feuille d’érable décroche la note de 16 points. À l’inverse, la Chine est le cancre international avec une note de 88. Le pays verrouille tellement les libertés sur le Net qu’il réussit le tour de force à faire pire que la Syrie (87), pourtant en guerre. Un score que partage aussi l’Iran.

Par rapport aux autres pays (seuls 65 d’entre eux ont été notés sur les 193 dans le monde qui sont reconnus par l’ONU), la France au huitième rang mondial à égalité avec l’Afrique du Sud, l’Italie et la Géorgie. Parmi les États qui ont été évalués par Freedom House, 17 pays permettent de jouir d’une bonne liberté sur Internet, 28 autorisent un exercice partiel des libertés et les 20 derniers sont considérés comme liberticides sur la toile.

Commentant de façon générale la situation en France, Freedom House constate que « la France a étendu l’état d’urgence à la suite de l’attaque majeure qui a frappé Paris au mois de novembre 2015, autorisant les forces de l’ordre à surveiller et détenir des individus avec peu de supervision judiciaire ».

Dans le détail, sur les trois critères d’évaluation établis par l’association (à savoir les obstacles à l’accès à Internet, les restrictions sur les contenus, et les violations des droits individuels), c’est d’abord sur la troisième jauge que la France trébuche.

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